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Il meurt lentement
Celui qui ne voyage pas,
Celui qui ne lit pas,
Celui qui n'écoute pas de musique,
Celui qui ne sait pas trouver grâce à ses yeux.
Il meurt lentement
Celui qui détruit son amour-propre,
Celui qui ne se laisse jamais aider.
Il meurt lentement
Celui qui devient esclave de l'habitude
Refaisant tous les jours les mêmes chemins,
Celui qui ne change jamais de repère,
Ne se risque jamais à changer la couleur
De ses vêtements
Ou qui ne parle jamais à un inconnu
Il meurt lentement
Celui qui évite la passion
Et son tourbillon d'émotions
Celles qui redonnent la lumière dans les yeux
Et réparent les coeurs blessés
Il meurt lentement
Celui qui ne change pas de cap
Lorsqu'il est malheureux
Au travail ou en amour,
Celui qui ne prend pas de risques
Pour réaliser ses rêves,
Celui qui, pas une seule fois dans sa vie,
N'a fui les conseils sensés.
Vis maintenant !
Risque-toi aujourd'hui !
Agis tout de suite !
Ne te laisse pas mourir lentement !
Ne te prive pas d'être heureux ! "
Pablo Néruda
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A la gorge d’un gouffre où gargouille du miel
Les rides du soleil fondent la nuit fugace
Sur des barres de fer dont les ongles de glace
Griffent les marais nus d’une perle de ciel.
La ruse d’un trésor trop artificiel
Trompe le mendiant serrant dans sa besace
Une lune de plomb qu’un diamant délace
Comme un gant de satin se colorant de fiel.
Des courtines de serge au vent du crépuscule
S’ouvrent en chuchotant les mots d’un opuscule
Ecrits au stylet d’or sur une peau de lait.
Et comme par hasard le parfum d’un mensonge
Emprisonne un enfant dans un étrange songe
Dont la mémoire meurt dans un rêve parfait.
Francis Etienne Sicard Lundquist
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Ma feuille est blanche, immaculée,
La muse assoupie, d'inspiration dépouillée.
Pourtant des images me font signe :
Majestueux, sur les eaux, glisse le cygne.
Ma main s'égare un peu...trace quelques lignes.
La muse s'éveille et les mots grisonnent
Sur la page. Au bord du lac qui frissonne,
Vient s'ébattre, noble et gracieux, le cygne.
Ma main court à présent, sans ratures;
Le vélin peu à peu perd de sa pâleur,
La poésie est là offrant la beauté, la douceur:
Le bel oiseau déploie sa royale parure..
Dans un songe je le revoie encore plus beau,
Surgissant derrière la brume, en un tableau,
Il tourne un peu sa tête, fière et digne,
Conscient sans doute, qu'une Muse lui fait signe.
Marielle
( N° 34 du recueil "Entre fleur et parfums...." )
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-« Corossol ! Rafraichi ! Sapotille et Coco ! »
Le fer nu des appels vers le quai se faufile
Bousculant le brouillard comme un cocorico
Lancé par la marchande au réveil de la ville.
Tous les cris de la rue embouchant leurs clairons
Investissent déjà le port de Pointe-à-Pitre.
Ils pourchassent la paix attardée aux balcons
Taraudent les volets en rudoyant les vitres.
On entend galoper la cavale des cris
Vers les guichets du ciel où les heures défilent
La darse, dans le vent, bat son édredon gris
Et ne guérira pas de son rut mercantile.
« Journal en moin ! » « Bonbons moussache ! » « Hé paté chaud ! »
La rue est là qui moud sa nouvelle rengaine.
Le soleil attisant le feu de son réchaud
S’active et tous les toits se plaindront de migraine.
L’usine et la TRANSAT bâillent les ouvriers.
Les trottins minaudant vont faire la dînette
Et l’on dirait, de loin, des vols de sucriers
S’égaillant pour saisir quelque invisible miette.
« Les pistaches ! » « Sorbet ! » « Sic à noix ! » « Bien grillé ! »
Sombrent dans un sanglot tous les cris de la rue
Quand s’ourle dans la nuit, maléfique et rouillé,
Le chœur des matous sur la cité qui s’est tue.
Florette MORAND (née 1937 Guadeloupe)
Chanson pour ma savane
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Un oiseau chante ne sais où
C'est je crois ton âme qui veille
Parmi tous les soldats d'un sou
Et l'oiseau charme mon oreille
Écoute il chante tendrement
Je ne sais pas sur quelle branche
Et partout il va me charmant
Nuit et jour semaine et dimanche
Mais que dire de cet oiseau
Que dire des métamorphoses
De l'âme en chant dans l'arbrisseau
Du cœur en ciel du ciel en roses
L'oiseau des soldats c'est l'amour
Et mon amour c'est une fille
La rose est moins parfaite et pour
Moi seul l'oiseau bleu s'égosille
Oiseau bleu comme le cœur bleu
De mon amour au cœur céleste
Ton chant si doux répète-le
À la mitrailleuse funeste
Qui chaque à l'horizon et puis
Sont-ce les astres que l'on sème
Ainsi vont les jours et les nuits
Amour bleu comme est le cœur mêmeGuillaume APOLLINAIRE
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