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Les bois vont refleurir. Des gouttes de verdure
Déjà tremblent au bout des rameaux dépouillés,
Et les bourgeons bientôt, voilant l’écorce dure,
S’ouvriront au soleil, de sève encor mouillés.D’un long sommeil la terre en souriant s’éveille ;
Tout en elle est tiédeurs, rougeurs, troubles charmants.
Les jours vont grandissant : de la saison vermeille
On voit partout flotter de frais pressentiments.Les vents passent chargés de promesses secrètes ;
L’oiseau ne chante point encor ; sur les buissons
Point de fleurs; mais déjà rossignols et poètes
Sentent monter en eux la sève des chansons.Des gais soleils d’avril voici l’heure première.
Avril, c’est le printemps dans sa virginité.
L’air est d’un bleu profond, suave est la lumière ;
Un sang jeune sourit au front de la beauté.Bientôt les bois naissants, les mousses, les fougères
Feront un dais mobile au cours chantant des eaux ;
Et les vents berceront sur leurs ailes légères
Dans les lilas en fleur l’hymne heureux des oiseaux.Bientôt se cueilleront les prémices des choses :
L’alouette dans l’air dira les jeunes blés,
Et le bouvreuil muet, caché parmi les roses,
Couvera les œufs blonds sous sa plume assemblés.Qu’un autre, après l’hiver, chante sa délivrance !
Qu’il dise, ô mois de Mai, ton retour souhaité !
Pour moi, je chante Avril ! Avril, c’est l’espérance,
Avant qu’on ait souffert, avant qu’on ait douté !Mois aimé, tu marquas dans ma verte jeunesse ;
Du bonheur je te dois les rêves infinis.
Qu’importe que la vie ait trahi leur promesse !
Pour mes espoirs défunts, Avril, je te bénis.Auguste Lacaussade
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Elle voudrait une gerbe de songes
pour sa mémoire transie.
Un logis pour mettre son souffle au chaud.
Elle voudrait des poèmes de la pluie pour irriguer
les plantes grasses de son destin.
Des colliers de parfums en guise d’amour
Elle voudrait une pierraille luisante
pour apothéoser son apparence.
Des poumons d’or pour mieux suivre
toutes les cohortes des saisons.
Voici l’oeil secret de la femme-monde
Mahamoud M’Saidié
(extrait de "Une gerbe de songes")
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La montagne s’est couverte de fleurs noires
D’étranges oiseaux ont recueilli ta voix
Et nous voilà demandant aux étoiles
Où est passé le juste qui semait des poèmes
Quand la terre portait les fruits de la douleur
Et quand coulait le rêve dans les yeux des ruisseaux
Le temps est un grand chant qui borde le chemin
Il renaît aux lèvres du matin
Avant de s’en aller bercer l’univers
Et les cristaux des larmes
Mais le vent
Mais le souffle
Mais cette voix de pays où bourgeonne l’été
Ont gravé les choses graves
Que fredonnent la vie comme un feu de bois
Et nous voilà demandant aux étoiles
Quand reviendra le juste qui chantait Aragon
Et qui nous enseignait la tendresse des mots
Ce langage équitable de l’homme inconsolé
Ce petit peu d’amour sur la crête des sans voix
Pourtant
La montagne reprendra ses couleurs
Désarmera la douleur et l’oubli
L’ombre qui palpite de souffrir la mémoire
Chantera
Chantera
Jean Ferrat
Comme chantent les cailloux au fond des rivières
Et ce sera ton vrai visage
Ta voix à jamais voile des îles fraternellesJean Ferrat.
Ernest PEPIN pour Jean FERRAT
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J'ai retrouvé ton bâton de "cornouiller",
J'ai caressé son bois dur et lustré,
Lustré et façonné aux creux des tes mains.Aux creux de mon cahier dès demain,
Je retrace en sens inverse le chemin,
La plume légère je retourne vers le passé.J'y retrouverai mes amis, mon entrain,
Et j'irai dans tes pas, en les joyeux matins,
Le long des berges ou par les sentiers.Le bouts de mes doigts d'inspiration déliés,
Aux creux de mon coeur, les souvenirs réveillés,
Et l'amour de toi, guidant ma main
Mes idées s'en iront noircir le parchemin.Marielle
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Ô pleurs d'amour, fureur !D'eux-mêmes — jaillissant !
Ô la Bohème en pleurs !
En Espagne : le sang !
Noir, ô mont qui étend
Son ombre au monde entier !
Au Créateur : grand temps
De rendre mon billet
Refus d'être. De suivre.
Asile des non-gens :
Je refuse d'y vivre
Avec les loups régents
Des rues — hurler : refuse.
Quant aux requins des plaines —
Non ! — Glisser : je refuse —
Le long des dos en chaîne.
Oreilles obstruées,
Et mes yeux voient confus.
À ton monde insensé
Je ne dis que : refus.
15 mars-11 mai 1939.
(traduction Eve Malleret)
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